jeudi 20 mars 2014

Crazy, crazy, crazy

Non, mais oh.

Non, mais oh !

Stop !!!

Ca va là, stop !

Là où je travaille, on fabrique de grandes choses, et de petits hommes. Des hommes à l'âme rase-moquette, pétris de petites ambitions de pouvoir et galvanisés par l'argent. Des hommes qui jouent à merveille une partition hypocrite et parfaitement rodée, une comédie pathétique teintée de sexisme et de classe à 2 francs. C'est pourtant devant ce film que je m'esclaffe jour après jour, depuis 5 ans. Car moi aussi, j'ai bien appris mon texte. Je connais mon rôle, et mon personnage me colle parfois à la peau, bien plus que je ne le souhaiterais.

Et il faudrait que je laisse ces gens-là m'exploiter ? Aspirer mon temps, ma bonne humeur, ma santé ? Entacher le bonheur que j'ai à retrouver ma fille chaque soir, après le travail ?

Eh bien oui. J'évolue dans un monde où ces choses-là sont non seulement acceptables, mais indiscutablement normales. On a décidé que tel document devait être prêt pour demain et que je serais en charge de le créer ? Si je discute, si je n'ai plus le temps parce que j'ai fait ma journée, je suis en tort. Je suis amoindrie, je passe illico dans la catégorie des employés de deuxième classe, ceux que l'on met sur un strapontin siège éjectable. Je le sais, alors je ne le fais pas. Je travaille chez moi, je fais cadeau à ces vauriens de précieuses et rares heures de liberté.

Pas pour être reconnue - faut pas rêver, mais pour ne pas être rejetée. Mais encore : pour qui, pour quoi ? Pour l'argent, un peu, et pour ne pas décevoir mon entourage professionnel, beaucoup.

Et pourtant, c'est trop cher payé. La brûlure dans mon estomac, la culpabilité dans mon coeur, la tension partout, la tristesse souvent... Est-ce que ça vaut mon salaire mensuel, ça ? Certainement pas. Ce n'est pas cela que je vends.

Qui veut constater, au bout de sa vie, qu'il a laissé sans broncher d'autres hommes disposer du temps ridiculement court qui nous est concédé ?

Personne. Et pourtant, nous sommes des armées à s'engouffrer volontairement dans ce foutu piège. 

C'est une prison psychologique. On croit devoir quelque chose à quelqu'un. On laisse ce ou ces quelqu'un prendre l'ascendant, et c'est fini. On se retrouve à obéir. On ne peut plus dire non.

Je tiens à ma vie, ma vie unique, avec mon homme unique, ma fille unique, et l'espoir de voir ma famille s'agrandir. Alors je vais la sortir de ce mauvais pas, cette vie. Laisser derrière moi cette montagne de non-sens, ces batailles politiques, ces questions d'argent, ces tribunaux de grande injustice.

Je me le dois, je nous le dois.

La suite au prochain épisode...



3 commentaires:

  1. et ben zut, c'est pas la joie :( je ne fais pas la même chose, mais je connais le même système et je compatis... vivement que cela puisse changer pour toi... pour vous.

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  2. Merci, j'y mets toutes mes forces et ça me fait du bien de savoir qu'on me soutient ! Mille bisous.

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  3. Alors des nouvelles ? Des grandes décisions ont été prises ? L'été revient, chacun va sortir de sa grotte... Le soleil nous invite à partager de nouveaux nos joies, colères et peines autour d'une bière en terrasse ;-) Tu es des nôtres bien sur !
    Je me reconnais tellement dans cette guerre pour choisir sa vie, profitez des jours qui nous sont offerts de vivre... Je n'ai pas les mêmes difficultés à rester humaine dans mon travail, mais la prise de conscience de vivre dans une société qui nous guide trop, nous laisse plus l'option de vivre autrement...
    Allez poulette haut les cœurs, on se racontera tout ça...
    Et tiens nous au courant si des choses bougent pour toi...

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